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Actualités 26/05/2011

Bilan mitigé pour le plan douleur 2006-2010


[APM] Le plan douleur 2006-2010 a principalement permis d'améliorer les conditions de prise en charge en renforçant notamment la formation et les recommandations de bonnes pratiques mais semble avoir manqué ses objectifs concernant la structuration de l'offre de soins en particulier, selon le rapport d'évaluation du Haut conseil de santé publique (HCSP).

Dans ce rapport diffusé lundi, le HCSP recommande au ministère de la santé d'élaborer un quatrième plan douleur "afin de donner un nouveau souffle aux actions entreprises et de s'assurer de la poursuite de l'engagement des pouvoirs publics dans ce champ".

Saisi en mai 2010 par la Direction générale de l'offre de soins (DGOS) pour évaluer le plan 2006-10, le HCSP a auditionné 35 personnes et examiné 16 contributions écrites afin d'analyser la structuration et le déroulement du plan.

A la lumière du bilan des actions prévues et réalisées, il apparaît que "la grande majorité des personnes auditionnées (...) a considéré que la prise en charge de la douleur s'est améliorée en 10 ans en ce qui concerne tant l'information, la formation, la détection, l'évaluation que le traitement".

"Le fatalisme en matière de douleur est moins de mise, les personnes algiques sont plus exigeantes, les professionnels de santé plus attentifs...".

Cependant, le Haut conseil souligne que "ces améliorations ne doivent pas masquer la grande hétérogénéité dans les pratiques et dans l'organisation des soins, et une trop faible attention aux populations les plus vulnérables" et estime qu'"il reste beaucoup à faire".

"Les soignants investis dans la prise en charge de la douleur ont besoin d'être soutenus et confortés. Ils sont inquiets sur la pérennité des structures actuelles et sur leurs moyens pour répondre aux besoins des patients."

De manière générale, le HCSP relève que "la plupart des avancées" ont porté sur les mesures visant à améliorer les conditions de prise en charge de la douleur, c'est-à-dire la formation, l'élaboration de recommandations, les études épidémiologiques.

Il cite en exemple la meilleure formation des professionnels sur la iatrogénie médicamenteuse, la standardisation des pratiques et leur actualisation en fonction de l'état du savoir sous forme de recommandations ou de règlements, l'inscription de la douleur parmi les critères d'accréditation et de certification pour améliorer la qualité des soins hospitaliers, une meilleure connaissance des contextes de prise en charge et une meilleure collaboration entre acteurs.

En revanche, même si ce troisième plan "a eu un impact important sur le milieu professionnel hospitalier en termes d'animation ou d'encouragement à l'innovation", il est "passé à côté de son objectif" d'amélioration de la prise en charge la douleur proprement dite, concernant les structures, les personnels, les médicaments ou techniques antalgiques, "pour n'avoir pas assez pris en compte les contraintes exogènes".

Parmi celles-ci, le HCSP cite "l'organisation et le financement de l'hôpital public", "les limites des incitations en direction de l'industrie pharmaceutique pour développer des nouvelles formes galéniques d'antalgiques et demander des AMM", "le relatif isolement de la médecine libérale", "les conditions de rémunération imposées par l'assurance maladie aux professionnels médicaux et non médicaux".

Le HCSP déplore que "la structuration territoriale et l'organisation de la lutte contre la douleur chronique rebelle se so[ient] heurtées à un manque de moyens et d'impulsion politique et à l'absence de cadrage".

Malgré une hausse de 10,9 millions d'euros du "flux financier associé à la douleur" entre 2006 (51,7 millions d'euros) et 2009 (62,6 millions en 2009), selon les données financières des agences régionales d'hospitalisation (ARH), "les témoignages émanant du terrain font plutôt état de la diminution des postes que de la création d'emplois, ce qui laisse penser (sous réserve d'un bilan réel de l'utilisation des crédits) que cet argent a probablement été utilisé à d'autres fins au sein des établissements de santé".

Une fragilisation des structures

"A l'issue du plan, le constat est plutôt celui d'une fragilisation des structures antidouleur. Certains centres ont perdu du personnel sous la pression de restructurations hospitalières, d'autres ne se sont jamais vu attribuer leur crédits alors que ceux-ci ont été délégués aux établissements."

En conséquence, "l'accès aux structures de prise en charge de la douleur chronique rebelle n'en a été que plus difficile" et "les délais d'attente sont longs", pointe le HCSP.

La Société française d'étude et de traitement de la douleur (SFETD) avait exprimé à plusieurs reprises ses inquiétudes concernant le financement de ce troisième plan, craignant en particulier que l'argent soit utilisé à d'autres fins, rappelle-t-on.

Le Haut conseil observe aussi qu'"il n'a pas été possible d'établir si les crédits visant à financer la mise en place du groupe homogène de séjour (GHS) douleur ont été utilisés, au regard de la faible incitation liée au codage" et que "les sommes inscrites au titre du plan ont été financées par des crédits 'ordinaires' de l'assurance maladie".

Au total, sur le plan financier, 21,4 millions d'euros ont été engagés sur les 26,7 millions d'euros prévus, est-il indiqué dans le rapport.

L'évaluation met également en évidence que le plan avait une "approche très 'hospitalo-centrée', en l'absence de soutien à la création de nouveaux réseaux. Les rares réseaux existants sont en outre restés expérimentaux, ne touchant qu'un très faible nombre de professionnels et très peu de malades, déplore le HCSP.

Hormis une tentative de développement d'outils de formation en milieu gériatrique, "aucune réflexion n'a eu lieu pour impliquer de manière plus importante la médecine de premier recours".

Les oubliés du plan

Concernant la priorité n°1 du plan, la prise en charge des populations les plus vulnérables, le HCSP note que "des gros efforts ont été faits" pour les soins aigus des enfants mais qu'"il persiste de vraies difficultés" pour la prise en charge des douleurs chroniques, avec un accès très insuffisant aux techniques non pharmacologiques, en particulier psychocomportementales.

Pour les personnes âgées, "un effort réel" a été fait pour créer une "culture douleur" mais essentiellement dans les institutions gériatriques alors que 90% des personnes de plus de 75 ans vivent à domicile et que la moitié se plaint de douleur.

Quant aux personnes porteuses d'un handicap et celles atteintes de maladies mentales, elles sont "les oubliés du plan", très peu de mesures ayant concerné les premières et aucune les secondes.

Enfin, sur le plan de la formation, le HCSP note que l'impact des avancées obtenues est "tempéré par des limites qui persistent en termes de débouchés hospitaliers et de conditions d'exercice en ville, à la différence du secteur des soins palliatifs".

Concernant les traitements antalgiques, il apparaît que "les connaissances concernant les méthodes non pharmacologiques ont peu progressé et les obstacles au développement des thérapies non médicamenteuses restent nombreux sans véritable volonté politique de vouloir surmonter l'obstacle principal que représentent les conditions de rémunération imposées par l'assurance maladie aux professionnels non médicaux".

Le HCSP a tenu à expliquer que l'évaluation du plan s'est heurtée à plusieurs difficultés, notamment la difficulté d'imputer au dernier plan les succès ou les manques constatés puisqu'il s'agit du troisième mis en place; le chevauchement de ce plan avec d'autres, comme les plans concernant les cancers, les soins palliatifs et les personnes âgées; les délais nécessaires à la réalisation de certaines mesures.

Rapport d'évaluation du plan d'amélioration de prise en charge de la douleur 2006-2010 du HCSP

logo APM (Agence de Presse Médicale)

25/05/2011

ld/co/APM polsan
redaction@apmnews.com

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