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L’ostéopathie à l’hôpital : entre réticences et bonnes pratiques

Si les freins à une pratique ostéopathique à l’hôpital sont nombreux, un dialogue commence à naître entre le milieu hospitalier et les ostéopathes. D’ailleurs, dans le cadre du plan stratégique 2010-2014, les établissements de l’AP-HP se penchent sur les médecines complémentaires en raison de la demande des patients. Le but de l’AP-HP est de faire un état des lieux quantitatif et qualitatif de l’offre existante. Tour d’horizon de la situation actuelle avec le regard de trois professionnels.

Le regard d’un chef de service

Entre ostéopathes et chefs de service, la collaboration est possible et fructueuse comme l’illustre la démarche de Georges Elhomsy à l’hôpital de Troyes. Chirurgien en chirurgie générale digestive et chef du service de chirurgie pariétale, Georges Elhomsy travaille avec un ostéopathe car, pour lui, la chirurgie est une indication pour l’ostéopathie. « Je suis convaincu depuis de nombreuses années et j’ai pris l’initiative d’envoyer mes patients vers un ostéopathe en ville car il n’y a pas de poste créé à l’hôpital ». Pour autant il n’existe pas de poste d’ostéopathe à l’hôpital.

L’avis d’un praticien hospitalier algologue ostéopathe

Médecin urgentiste au Centre Hospitalier Ariège Couserans, Barthelemy de Truchis a complété sa formation avec plusieurs diplômes dont un d’algologie. Il a suivi une formation de base à l’ostéopathie durant six ans. Aujourd’hui, il partage son temps entre les urgences et la consultation consacrée à la douleur chronique. « Quand je me suis demandé comment intégrer ma pratique d’ostéopathe dans un contexte hospitalier, j’ai compris que ma consultation d’algologie était le lieu fait pour ça. L’hôpital n’aurait jamais ouvert de consultation d’ostéopathie en tant que tel », explique le médecin ostéopathe. Avant d’ajouter « Ma pratique d’ostéopathe n’existe que sous couvert de ma compétence d’algologue au sein de l hôpital ».

Pour lui, l’ostéopathie est une prise en charge complémentaire aux prises en charge traditionnelles. « L’approche ostéopathique s’intègre bien aux autres propositions thérapeutiques hospitalières. Lorsqu’il y a une dimension de souffrance psychologique, je réoriente le patient vers un confère psychiatre ou psychothérapeute » souligne Barthelemy de Truchis.

Celui-ci est bien conscient que la situation des ostéopathes non-médecins qui exercent en milieu hospitalier est à chaque fois particulière et que leur pratique peut être mal comprise voire mal acceptée du point de vue médical. « Il faut respecter le temps hospitalier. La pratique ostéopathique conjointement aux prises en charge hospitalières usuelles notamment dans les consultations douleur est bénéficiaire au patient. Mon sentiment est que nous ne sommes qu’au début dans le changement de nos pratiques de soins. A mon sens ce sont les associations de malades qui solliciteront le plus les changements de pratique pour que les patients hospitalisés puissent bénéficier d’autres modalités thérapeutiques comme l’ostéopathie », affirme le médecin.

L’exemple d’un ostéopathe non professionnel de santé

Depuis cinq ans, l’ostéopathe Emmanuel Hartmann exerce, dans le cadre d’une association, l’Association des Ostéopathes en Milieu Hospitalier (AOMH), au sein de la maternité d’Arcachon : « Les sages-femmes de l’hôpital nous adressaient régulièrement des nourrissons avec des troubles fonctionnels nettement installés. Devant cette situation, nous nous sommes regroupés avec d’autres ostéopathes au sein de l’AOMH et avons proposé au chef de service de l’établissement un projet qui se voulait sérieux (concernant des ostéopathes membres en exercice exclusif uniquement) et pérenne. Heureusement, la maternité d’Arcachon était très ouverte quant aux problématiques d’accueil de la mère et de l’enfant, ce qui fait que notre projet a été accepté. » L’association exerce aujourd’hui, et depuis 5 ans, deux demi-journées par semaine dans un cadre bénévole. « Seules quelques personnes individuelles en France ont réussi à établir une convention rémunérée avec des hôpitaux publics », souligne l’ostéopathe. Ce qui prouve qu’on en est aux prémices des collaborations entre ostéopathes et établissements hospitaliers publics.

Les interventions d’Emmanuel Hartmann ont lieu avec l'aval des pédiatres, sur signalement des bébés à traiter par le personnel soignant. «Les ostéopathes de l'association traitent environ 30 % des nouveau-nés autour de J+2. L’intervention, qui est unique pour ne pas trop fatiguer le nouveau-né, traite surtout des troubles fonctionnels (difficulté à prendre le sein, pleurs continus, œdème du crâne après un accouchement difficile (torticolis, etc.) avec des techniques douces comme l’approche crânio-sacrée par exemple », explique le praticien.

Au sein de l’équipe pluridisciplinaire, les relations sont plutôt bonnes. « Il faut dire que lorsque notre association a commencé à intervenir, nous avons fait des réunions de travail pour expliquer nos méthodes et essayer d’adopter un vocabulaire commun. Une démarche nécessaire lorsque l’on sait qu’il n’y a pas d’étude scientifique démontrant les résultats de l’ostéopathie périnatale. » Il est évidement essentiel que les relations soient bonnes pour que les ostéopathes puissent continuer d’intervenir dans les maternités. « C’est surtout avec les pédiatres et l'équipe soignante qu’il faut entretenir de bonnes relations car ce sont eux qui nous donnent l’aval pour soigner les troubles du confort des nourrissons que nous prenons en charge ».

Pour Emmanuel Hartmann, le regard sur l’ostéopathie en maternité est en train de changer : « Auparavant, les mamans étaient assez surprises de constater que l’ostéopathie était aussi préconisée pour les bébés et elles s’étonnaient de voir des ostéopathes en maternité. Avec les cours de préparation à l’accouchement, l’information a été véhiculée et l’effet de surprise tend à disparaître. Attention toutefois à ne pas généraliser. L’ostéopathie en maternité n’en est qu’à ses débuts et connaît des freins majeurs. Des freins qui sont d’ordre scientifique (on manque d’études sur les bénéfices de l’ostéopathie, ce qui entraîne un déficit de reconnaissance de cette pratique de la part des grands pontes du monde hospitalier), pratique (on manque aussi de budget pour rémunérer les ostéopathes) et culturel (le monde médical n’est pas habitué à raisonner en intégrant l’ostéopathie). »

Dernière modification le 07/04/2015

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